Raconte moi des histoires

Pour bien raconter les histoires, il faut aussi savoir les écouter

Mon amie Adèle ou le piétinement de la suspension consentie de l’incrédulité

Titre trop long. Profitant de moments où mon mec n’est pas là, je regarde films et séries. Comme j’essaie de ne pas m’enfermer dans un genre, je m’applique à varier les plaisirs. Une série coréenne, une série un peu fantastique, un polar, une série turque… ah tiens, une série thaï, ça vaut quoi ? Etc. Sans oublier les télénovelas sexy que je trouve généralement mal écrites mais les gens sont beaux et souvent nus, alors… En scrollant, je tombe donc sur “Mon amie Adèle” qui a un air de polar britannique. Ah, tiens, ça a l’air pas mal. Et effectivement… Jusqu’à un plot twist bien étrange.

Mon amie Adele, un polar so british

Ca commence comme une comédie romantique nulle

Mon amie Adèle, ça parle de quoi ? Louise est une mère célibataire qui va dans un bar rejoindre une amie. L’amie lui pose un lapin mais comme elle renverse son verre sur un joli monsieur, elle passe la soirée à discuter avec lui. Ils s’embrassent à la sortie du bar mais le joli monsieur fait “oh non, je ne peux pas” et part. Sauf que… plot twist : le joli monsieur est en fait David, le nouveau patron de Louise. Et il est marié, oups. Ok, ce premier rebondissement m’a fait souffler fort par les narines. C’est un polar ou une comédie romantique à base de “oh ça alors, les coïncidences, hihi” ? Louise est un peu gênée mais David et elle décident de faire comme si la scène du bar n’avait jamais eu lieu. Ok.

mon amie Adele, Louise et Adèle

Un étrange triangle amoureux

Sauf que ! En amenant son fils à l’école, Louise entre en collision avec une femme qui courait dans la rue et elles sympathisent. Plot twist, c’est Adèle, la femme de David. “Oh ça alors, les coïncidences, hihi”. Adèle s’attache immédiatement à Louise et lui fait jurer de ne rien dire à David de leur amitié car il ne veut pas mélanger travail et vie perso. Louise se retrouve donc à fréquenter Adèle en cachette… tout en entamant une liaison avec David. Une sorte de triangle pas toujours amoureux où seule Louise sait la vérité même si… Adèle n’en saurait pas un peu trop ?

Adèle et Louise dans Mon amie Adele

Un mystérieux passé

En parallèle, on va avoir droit à des flashbacks de la vie d’Adèle (…) dans un hôpital psy qu’elle a fréquenté dans ses jeunes années, après que ses parents soient morts dans un incendie. Dans cet hôpital, elle va sympathiser avec Robert, un mec qui a quelques soucis de terreurs nocturnes mais aussi de drogue. Un marginal à la vie moisie qui devient le meilleur ami d’une semi princesse Disney, en quelques sortes. Oui parce qu’elle est orpheline mais über pleine aux as et a chopé le très beau prince de service, aka David. Donc la série va rapidement nous poser implicitement trois questions : les parents d’Adèle sont-ils vraiment morts dans un accident ? Où est passé Robert ? La rencontre entre Adèle et Louise est-elle si accidentelle ?

Robert et Adèle dans Mon amie Adèle

Qui est le méchant de service ?

Parce que oui, sans nous donner les clés, la série nous fait comprendre qu’il y a un problème avec Adèle. Ou David ? Alors sans vouloir trop éventer le suspense, je ne trouve pas les charges contre David bien lourdes. Dans le sens où on insiste beaucoup trop sur Adèle pour ne pas comprendre que le “secret” vient d’elle. Sinon, pourquoi insister sur sa vie à l’hôpital ? Ah oui, ça sert un peu car elle accroche Louise sur les terreurs nocturnes. Louise en étant également victime et Adèle sait ce que c’est grâce à son ami Robert. Elle donne même le journal de Rob à Louise pour l’aider à maîtriser ses rêves. 

Adele est une psychopathe

Ah mais c’est une série fantastique, en fait ?

Bref, la série avance, Louise est partagée entre son amitié pour Adèle et son attirance pour David. On sent que le climax arrive, essentiellement parce que dans les flashbacks, Adèle et Robert ont quitté l’hôpital psy et qu’ils vont se revoir chez Adèle. On a à peu pris compris que Robert était mort, peut-être tué, on va avoir une explication et… c’est là que tout bascule. Ca bascule vénère même puisque la série prend un chemin fantastique. Au sens du « genre fantastique », ce n’est pas un jugement de ma part. Pardon ? J’ai posé ma switch deux minutes pour scruter ma télé. De quoi ?

On ne m’avait pas préparée à ça

Alors je ne vais pas spoiler le gros élément fantastique qui permet un plot twist intéressant. Je l’ai deviné avant qu’il n’arrive à partir du moment où j’ai eu les clés mais ça reste intéressant. Sauf que moi, je n’étais pas là pour ça. Je regarde pas mal de séries un peu fantastiques, essentiellement parce que je trouve que le genre peut permettre de s’affranchir de quelques règles “de la vraie vie”, dirons-nous. C’est toujours un peu de l’équilibrisme, je ne dis pas. Si je me réfère à Arrival qui m’avait inspiré l’article sur la suspension consentie de l’incrédulité, j’avais accepté de marcher. Alors que mon mec pas du tout. Je peux accepter des histoires de gens qui reviennent à la vie, des âmes qui se logent dans le mauvais corps, des histoires de fantômes qui font pleurer fort. Tant que ça ne verse pas trop dans la facilité scénaristique et les “ta gueule, c’est magique”, je veux bien. Mais quand je regarde une fiction fantastique, je suis préparée. Je sais que je rentre dans un univers où certaines vérités peuvent être remises en question. 

Mon amie Adèle, un plot twist compliqué

Un rabattage de cartes assez violent

Mais là, je n’étais pas là du tout. J’étais dans un univers polar plutôt bien mené puisque j’avais une totale empathie pour Louise et me retrouvais dans une situation de dilemme, un peu. Pas tant un dilemme “Adèle ou David”, Adèle étant une giga-forceuse et je déteste ça dans la vraie vie. Mais plus sur sa relation avec David, assez bien écrite. Le côté “hmmm, il est sexy et touchant mais quand même, il est marié et c’est peut-être un connard. Que faire ?”. J’ai de la sympathie pour Louise tout au long de la série, je la trouve touchante, plutôt maline, un peu perdue mais pas au point que ça m’angoisse. Et là, tout à coup, gros mélange des cartes qui étaient sagement posé sur la table et on part dans un autre univers. Je… Aïe, je bugue.

Mon amie Adele, quand le malaise s'installe

Me bouscule pas trop, quand même

Cette grosse redistribution des cartes, Karim Debbache en parlait pour Une nuit en enfer qu’il a visiblement adoré. Alors que c’est précisément à ce moment-là que j’ai éteint ma télé en décrétant que ce film, c’était de la merde. Bon, il me foutait déjà pas très à l’aise dès le départ mais là, non pardon mais c’est trop pour moi. Peut-être que j’ai raté le génie du film, je dis pas. J’ai toujours trouvé Tarantino surcôté et j’ai lancé le film avec un à priori. Mais il y a des dispositions. Je pourrais dire la même pour Le dernier pub avant la fin du monde. Bon, déjà, j’ai toujours eu un certain malentendu sur ce film puisque je croyais que c’était un film un peu philosophique sur un pub perdu dans la pampa avec des personnages hauts en couleur, façon Kusturica. Hell non, pas du tout. Mais le plot twist fantastique m’a pas tant gêné puisqu’il permettait de calmer l’insupportabilité du personnage de Simon Pegg. Parce que pour moi, le plus dur à avaler dans ce film, c’était pas les extraterrestres à sang bleu, non. C’était que les ex amis de Simon Pegg soient venus avec lui pour cette soirée de beuverie alors que visiblement, tout le monde le déteste. Moi la première.

le dernier pub avant la fin du monde

Le too much aide à faire passer

Mais que ce soit Le dernier pub ou Une nuit en enfer, le plot twist tordu passe parce qu’on est dans des univers “too much”. Il y a de l’humour et du potache. Dans Mon amie Adèle, pas du tout. C’est très terre à terre. Oui, il y a des scènes oniriques mais j’y vois plus une façon de nous montrer l’évolution de Louise qui reprend un peu sa vie en main qu’autre chose. Peut-être que j’aurais dû voir dans ces scènes étranges les prémices de la résolution mais ce n’est pas du tout ce que j’ai ressenti. On était à la limite des scènes un peu arty qui font plaisir au réal avant tout. Du coup, j’ai l’impression que la série a un peu triché. Que pour être sûre que je ne vois pas venir la résolution finale, elle a fait en sorte que je ne puisse pas l’envisager. Et c’est un procédé que je n’aime pas. Parce que vraiment, à la fin, j’étais en mode bouche bée sur mon canapé, incapable de décider si j’avais aimé la série ou pas et si j’acceptais sa résolution. Et c’est dommage parce que le dernier plot twist est bien mais on ne m’a pas préparé à accepter la réalité de ce que l’on me raconte.

David et Louise dans Mon amie Adèle

C’est pas un peu de la triche ?

J’ai toujours trouvé l’écriture de polar compliquée. Je ne m’y frotterais pas moi-même. Les trucs pour nous mettre sur de mauvaises pistes ou du moins cacher la bonne sont légion. Ce n’est pas toujours bien fait et j’avoue ne pas avoir de grande tolérance sur le sujet. Je déteste les coupables sortis du chapeau, le “mais le coupable, en fait, c’est le passant de la page 36”. Ecrire un polar est pas mal un travail d’illusionniste où il faut attirer le regard ailleurs. Mais l’ilusionniste utilise des trucages, pas de la magie. Dans Mon amie Adèle, le secret du magicien, c’est qu’il a vraiment des pouvoirs. Je… hmmm. Du coup, est-ce que je recommande la série ? Et bien si vous aimez les beaux Anglais, pourquoi pas ? Le casting est vraiment superbe, du bonbon pour les yeux. Pour le reste, si vous êtes tolérants aux changements de règle, oui, foncez. Sinon, ça va vous agacer.

Nina

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Revenir en haut de page