Raconte moi des histoires

Pour bien raconter les histoires, il faut aussi savoir les écouter

Raconter un système : secte ou dystopie ?

Longtemps, j’ai adoré les dystopies. J’adore toujours ça, d’ailleurs. Et je dis dystopie et non pas post-apo parce que le post-apo ne m’intéresse qu’à partir du moment où il y a un embryon de système qui se met en place. Quand tout est foutu par terre, on repart sur quoi ? Les dystopies tirent souvent les fils pour voir jusqu’où ça va. Des sociétés post-apo, des sociétés en cours d’effondrement, des sociétés apparemment idylliques, etc. Et moi, j’adore la systémique et la réflexion sur ce type de sujets. Mais ce que j’aime aussi, ce sont les histoires de secte. Les histoires fictionnelles, je précise. En vrai, ça me fait plutôt vriller. Et du coup, en tant que scribouilleuse du dimanche, je me questionne : pour parler système, le mieux, c’est la dystopie ou la secte ?

Ecrire un système, la dystopie ou la secte. Comme la servante écarlate
Ou alors écrire une dystopie basée sur la réussite d’une secte

Assez facilement : ça dépend de ce que l’on a envie de raconter. Si vous voulez vous poser sur un système politique, je vois pas trop comment vous allez appliquer ça à une secte. Si vous avez envie d’appliquer les théorie de la systémique, dystopie. D’ailleurs, c’est amusant car y a 20 ans (gasp), je détestais mes cours de systémique politique alors qu’en vrai, c’est assez passionnant. Surtout si on veut écrire de la fiction politique, ça offre pas mal de concepts et d’ingrédients pour créer un système cohérent et crédible. Moi-même, je devrais m’y replonger… Mmm. Bref, si vous tenez à tout prix à ce que votre fiction soit un cri d’alerte sur notre monde qui court à sa perte parce que le fascisme grimpant, parce que l’effondrement environnemental, parce que les deux… la dystopie semble plus indiquée.

Dessin New York 1997

Sauf que. La secte permet de penser plus petit et permet de développer aussi certaines thématiques. Un système précis, souvent peu voire pas démocratique. En exagérant un peu, on pourrait dire que tout parti politique a des allures de secte avec une figure du leader quasi christique, incritiquable, impossible à contredire. Des chefs de parti en mode gourou ? Un peu, surtout à une ère ultra-médiatique. Je veux dire, je veux écrire une fiction fortement inspirée du personnage de Trump, je ne sais pas si je vais écrire une dystopie ou une histoire de secte, franchement. Ecoutez deux minutes ce que disent les Q-anons avec Trump élu des Dieux pour combattre l’Etat profond. C’est assez marrant de choisir comme Elu de Dieu un mec reconnu coupable d’agression sexuelle, ayant eu des rapports avec une actrice porno, fièrement misogyne, ami proche d’Epstein. La gouroutisation est puissante, voyez. Bon, moi, je voulais surtout écrire une histoire avec Melania. J’y reviendrai peut-être un jour. Mais voyez comme la frontière peut être poreuse.

Le système Qanon
Comment tu veux écrire une fiction inspirée des Qanon quand la vérité ressemble à ça ?

Et puis souvent, dans ces récits systémiques, on va avoir la même base. Un système autoritaire, rarement juste, où un personnage va se réveiller pour entrer en rébellion. Plus ou moins violemment, plus ou moins subtilement selon les fictions. Ce qui me lisent depuis longtemps connaissent mon obsession sur l’entrée en résistance. Sans doute parce que je suis désespérée que dans la vraie vie, il ne se passe rien. Alors qu’on se fait confisquer nos acquis sociaux depuis 6 ans. Bon, c’est sûr, quand on manifeste sans fumier ni tracteur, on se fait éborgner. Ca motive peu. Raconter cette histoire en mode “secte” a l’avantage de dépolitiser un peu le propos. Oui, tout est politique, ne nous trompons pas, mais on peut le faire de façon plus ou moins frontale. Finalement, ça va dépendre de si vous voulez que votre audience réagisse au sous-texte ou pas.

Midsommar

La secte permet aussi de rajouter un élément un peu surnaturel si on le souhaite. Ou parler de foi tout à fait frontalement. Y a une série vue récemment dont j’hésite à vous parler parce que ce qui la rend géniale, c’est son plot twist. Et je ne peux pas le révéler. Ca s’appelle Kübra et le rôle principal est tenu par Cagatay Ulusoy… le mec qui a joué Le protecteur et Le tailleur. Il était globalement meilleur que dans les autres séries mais vu que son personnage est assez introverti. Ca parle globalement de foi et pas mal de la théorie de l’engagement. Une théorie assez pratique dans les deux univers que j’évoque puisqu’il est souvent courant de partir d’une figure très engagée dans le système dans lequel elle évolue et qui va avoir un réveil difficile. Jouer sur la dichotomie entre engagement total et entrée en résistance peut être intéressant, si c’est bien fait. Le tout est de travailler le pourquoi du rentrer en résistance, que ça tombe pas comme un cheveu sur la soupe.

Kübra

Bref, je trouve ce parallèle entre secte et dystopie si intéressante que j’ai presque envie de l’utiliser pour construire ma prochaine dystopie. Même si là, j’ai prévu de finir ma comédie romantique et d’enchaîner sur deux autres romans de résistance. Donc bon, ma dystopie sectaire, je devrais m’y mettre… en 2027.

Nina

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