Raconte moi des histoires

Pour bien raconter les histoires, il faut aussi savoir les écouter

Comment mettre en musique son roman

Ca fait longtemps que j’avais envie de parler musique par ici mais je ne savais pas trop comment m’y prendre. Parce que je ne suis pas musicienne et que je n’ai pas beaucoup les mots pour parler du sujet. J’avais imaginé une série d’article de type “cette chanson que j’aime bien et qui est la BO de mon roman”. Mais comment écrire un article sur une chanson entière alors que j’ai un vocabulaire très pauvre sur le sujet ? Surtout que la plupart du temps, si la scène que j’écris est en musique dans ma tête, telle une scène de film, il n’y en a pas dans la diégèse de ma fiction donc… mais là, arrive un projet qui va nécessiter un peu de musique et je m’interroge.

Camille Thomas, une violoncelliste sur un toit

J’ai pas envie de couper ma lecture pour écouter de la musique

Je n’aime pas trop quand l’auteurice me met de la musique dans les romans. Notamment parce que c’est souvent un truc de nord-américain à base d’un personnage dans une voiture qui écoute la radio. Et là passe une chanson. Sauf que neuf fois sur dix, moi, je la connais pas, sa chanson. Et je n’ai pas forcément envie de couper ma lecture pour aller écouter ce classique de la country américaine hyper connue mais pas en dehors de leur pays. C’est aussi Minier qui raconte toujours que son personnage réac et très imbu de lui-même n’écoute que du Mahler car il est d’une intelligence et d’un raffinement supérieur. Alors je suis allée écouter, m’attendant à un truc très sombre, très gothique et… mais pas du tout, en fait. Du coup, le héros sombre, il en a pris un coup. A la place, j’aurais mis Une nuit sur le mont chauve de Grieg. Ou The hall of the mountain king du même Grieg. Mais pas Au matin qui est vraiment dans un style radicalement différent. Ou la Toccata et Fugue en D mineur de Bach, radical.

Orgue
J’adore les orgues en vrai

Est-ce perdre le lecteur de parler de ce qu’il ne connaît pas ?

J’ai toujours un petit souci quand un livre fait appel à une connaissance que je n’ai pas. J’en avais parlé pour Une seule rose où Muriel Barbery nous parlait de dizaines de fleurs dans des scènes très graphiques alors que moi, je suis pas très forte en fleur. J’ai les connaissances de base, dirons-nous mais sorti des roses, pâquerettes, hibiscus et glycines, je bute un peu. Après, au pire, mon imagination peut choisir un substitut. Je peux tout à fait imaginer un dahlia plutôt qu’un camélia, Muriel Barbery va pas venir me gifler car je ne respecte pas son oeuvre. Publier ses écrits, c’est un peu perdre la main sur eux. Super idée d’article, je garde pour dans pfiouuuuu. De la même façon, je peux remplacer la chanson que je connais pas dans la scène où le héros ou l’héroïne roule sur la highway du désert, perdu dans ses pensées. Moi, je vais mettre Last Exit to Eden d’Amanda Marshall parce que ça va très bien avec un trajet en voiture, voilà.

Amanda Marshall sur une voiture

 Une aide à l’écriture avant tout

De façon générale, je ne détaille pas trop les chansons qui apparaissent ponctuellement dans mes romans, précisément pour laisser chacun faire à sa sauce. Par exemple, dans Green !, la chanson de Svea, c’est clairement Remember (walkin’ in the sand), ma chanson cheesy. La version de The Eden House, pas celle des Shangri-La ou d’Aerosmith. Green ! était aussi hanté par The light d’Hollysiz ou That night d’Izia. Mais ces chansons n’avaient pas d’importance narrative. Elles étaient là parce que je les écoutais au moment où j’écrivais et que ça calait bien mais je n’avais pas besoin de les écrire noir sur blanc dans mon histoire. De la même façon Pandemonium de Worakls qui est un titre que j’adore et qui m’obsède est déjà calé dans la fin de la quadralogie Ezialis. Oui, la quadralogie dont j’ai écrit 50 pages du volume un, mmm. Là encore, c’est une représentation que j’ai de la scène finale mais si une personne lit cette scène et envisage une autre musique, voire pas de musique du tout, ça n’a aucune incidence sur le récit. 

Le Worakls orchestra

Un soap version musique classique

Mais là, j’ai un projet d’écriture très musicale, en fait. Je vais profiter du nanowrimo pour me remettre à écrire et parmi les projets que je vais lancer, y a mon soap. Enfin, un autre soap que celui que j’imaginais. Au départ, je voulais partir sur High society avec des familles riches qui se disputent, gros classic shit. Mais après avoir vu The Penthouse, j’ai été inspirée. Une école de musique, oui. De petits cons riches et mal élevés, oui. C’est parti pour la music orchestra school academy… Non en vrai, j’ai pas encore le nom mais voilà, je vais écrire là-dessus. Pour me mettre un peu dans l’ambiance, en ce moment, j’écoute donc pas mal de musique classique pour voir ce que je peux incorporer. Evidemment, l’héroïne de l’histoire sera violoncelliste parce que le violoncelle, ça reste la vie. Ah tiens, Storm de Vivaldi (L’été), parfait pour une scène où elle répète dans sa chambre, en colère. Son love interest que je n’ai pas encore nommé est plus sur du piano. Tiens, je vois bien une scène où il joue La marche turque. Oh et Sonate au claire de Lune, Beethoven forever. Mais… attend, y a déjà une scène qui existe déjà.

Jouer de la musique

Des scènes existant déjà

Parce que oui, la peu cinéphile que je suis a quand même deux ou trois refs notamment sur la sonate au clair de Lune qui était parfaite dans… Entretien avec un vampire. Film que je ne veux pas revoir de peur d’être déçue. Et en cherchant la scène, je me rends compte que c’est pas du tout Sonate au clair de Lune alors que ça aurait été parfait. Le meilleur film de Tom Cruise à mon goût. Mais j’ai pas vu tant de films que ça avec lui, ok. Je suis pas très fan du Tom Cruise porn. Et il s’est raté sur Eyes Wide shut. Encore un film dont la BO m’a obsédée, notamment le chant lors de l’orgie qui est jouée à l’envers et que j’ai dans ma playlist Spotify. Je veux ma scène avec la Sonate au clair de Lune dans mon roman soap… comme je veux l’ôde à la joie. Musique que j’avais déjà utilisé dans un roman écrit durant ma prime jeunesse où l’héroïne était… violoniste. Mais y avait une scène de baise sur un piano que je pourrais réutiliser dans mon soap, tiens. Ce qui est marrant, c’est qu’évidemment, pour moi, l’ode à la joie, c’est vraiment le passage “O Freunde, nicht diese Töne” qui est vraiment un court passage de la symphonie. Mais j’ai prévu une petite scène de meurtre sur cette envolée. Plus ou moins inspirée de Neon Genesis Evangelion où il y a une grosse scène de bagarre sur la 9e. Je pourrais également mettre la 7e, Johnny represents. C’est la seule chanson de Johnny sur ma playlist mais il est tellement intense dessus, j’adore. 

Comment écrire la musique ?

Bref, alors que j’écoute, j’ai quelques idées de morceaux à intercaler. Je vais mettre Flight of the Bumblebee aussi, une bonne scène pour une bagarre de cordes. Oui, la rivale de mon héroïne sera violoniste, je vois trop une scène là-dessus. Ou ça pourrait être sur Storm, aussi. Le souci, c’est que pour le coup, la musique a de l’importance. Et la rivale va me faire une petite trille du diable, aussi. On ne joue pas pareil L’été de Vivaldi, Bumblebee ou les Gymnopédies de Satie adaptées au violoncelles et parfaites pour les débutants. C’est pas moi qui le dit. J’ai fait un an de violoncelle en 2004, je ne me souviens plus du tout de ce que j’ai pu jouer. Ah oui, mon soap va nécessiter pas mal de recherches. Et d’écoutes de morceaux sur Youtube ce qui, on va pas se mentir, est plutôt la part agréable du taf. Mais comment je mets ça en scène, en fait ? Dans un média audiovisuel, tu le mets et c’est tout. Dans The Penthouse, les personnages chantent de l’opéra sans forcément nommer ce qu’ils chantent. Sauf ce passage sur la Traviata que je vous mets parce que je l’adore. Cet article bat des records de lien externe. Mais moi, comment j’écris ça ?

The Penthouse : bagarre sur la Traviata

Ecrire les musiques qui trottent dans la tête ?

Evidemment, je peux l’écrire. Si Livia, l’héroïne, joue Storm, j’ai qu’à le dire. Je peux me renseigner même un peu pour donner corps à ça. Qu’elle fait glisser l’archet sur la corde du sol et je peux même pousser le crime à chercher quelle est l’erreur la plus fréquente. Genre elle est énervée donc peu concentrée et elle rippe. Mais comment juxtaposer ? Je veux dire si Music Orchestra School Academy était une série télé, il y aurait des scènes où personne ne joue de la musique mais elle est là, présente pour mettre de la tension. Ca a complètement du sens quand on parle de personnages qui baignent dans la musique. Même moi, ça fait une semaine que j’ai du Offenbach dans la tête alors que j’ai même pas de scène qui va avec. Je fais quoi ? Je démarre chaque chapitre par “sur la Ve de Beethoven” ? Ce qui pourrait être marrant mais je suis pas certaine d’en avoir à tous les chapitres. Ou y a un personnage qui vit la scène et qui a des notes en tête. “Il ne manquait que la sarabande d’Haendel pour souligner la parfaite solennité du moment”, un truc du genre. Oui, la même sarabande que dans Barry Lindon, oui. Deux fois que je cite du Stanley Kubrick en un article, je suis bien devenue cinéphile. Par contre, Barry Lindon, j’ai pas vu. Et sinon, c’est la même sarabande que dans la pub Lewis où un couple courait en cassant des murs.

J'ai une musique dans la tête

Est-ce que ça peut vraiment perdre le lecteur ?

Mais comment ne pas perdre le lecteur. Dans cet article, par exemple, j’ai mis de la musique partout en mettant des liens. Qui n’est pas allé voir de quoi je parlais. Bon, la V de Beethoven ou l’Ode à la joie, tout le monde l’a. Mais les autres ? Aucun jugement, hein. Personne ne peut tout connaître et bien heureusement. Ca permet de découvrir. Et puis moi, je connais certains trucs pour des raisons hyper prosaïque. Genre la trille du diable, je connais à cause de la reprise de Vanessa Mae. Ca ferait un super générique pour mon soap si c’était une vraie série, d’ailleurs… Mais du coup, est-ce que je risque pas de perdre le lecteur avec un morceau qui, moi, me parle, mais lui non ? Ou alors il substituera ? Il mettra la Ve partout parce que c’est la seule qu’il lui parle à lui. Et c’est pas bien grave. Quand Minier me parlait de Mahler que je ne connaissais pas, ça m’a poussé à écouter pour voir. Et puis peut-être que je me prends trop la tête pour rien vu que pour l’heure, Music Orchestra School Academy n’existe pas. Et que s’il existe, peut-être que personne ne le lira, ahah. Mais c’est un roman-soap que je vais grave mettre en musique. Ne serait-ce que parce que ça me donnera une meilleure culture musicale et ça, déjà, c’est bien.

Nina

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