J’avais promis de vous parler du mauvais timing du plot twist, je m’exécute. Parce que tu peux avoir un excellent retournement de situation, si tu le places mal, ça fait pshhht. C’est le cas d’Anatomie d’un scandale. La série. Parce que le livre, que j’avais lu avant, a bien joué ses cartes par contre. Hé oui, j’ai la chance de pouvoir analyser la même histoire sur deux supports différents et en mesurer l’écart et donc la mauvaise gestion du plot twist. Une vraie leçon d’écriture que je vous partage.
Un Ministre accusé de viol !
L’histoire ! Le séduisant Ministre de l’intérieur britannique, James Withehouse est accusé de viol par son ancienne collaboratrice et amante. Le roman va essentiellement nous raconter le procès et le calvaire de Sophie Whitehouse, épouse de James. Le roman nous est raconté à trois voix : celle de Sophie, en proie au doute, celle de Kate, la procureure générale qui joue un énorme coup. Et celle de Holly, une étudiante à Oxford. Oui, moi aussi, au départ, je me demandais ce que Holly faisait là.
Consentement ou non ?
Le roman est donc un pur produit Me too et jongle avec des thématiques importantes sur le sujet. Notamment la question du consentement. Le procès se concentre sur un acte sexuel en particulier qui se déroule dans l’ascenseur du Parlement. Lui dit qu’elle était consentante, elle dément. La défense va naturellement sortir la carte de l’ex bafouée qui veut se venger.
Un boy’s club de l’extrême
En parallèle, nous avons les déboires de Sophie, l’épouse trompée mais qui doit faire front commun avec son mari. Politique oblige. On la voit passer de la certitude de l’innocence de son mari. Car lorsqu’ils étaient étudiants à Oxford, James n’a pas été des plus fidèles et puis il y avait le club des libertins. Sorte de boy’s club option trou du cul avec tous les riches rejetons d’Oxford faisant de la merde. Genre détruire un resto parce que papa paiera les pots cassés. Ce l’un est narré dans les souvenirs de Sophie, James et dans les chapitres consacrés à Holly.
Une bouseuse chez les fils de
Mais c’est qui cette Holly, du coup ? Une bouseuse débarquée à Oxford. Plutôt brillante mais le genre de filles qu’on ne remarque pas. A l’occasion d’un cours de lettres, elle va côtoyer Sophie qui sera son binôme. Elle tombe également amoureuse de James, le brillant athlète de l’université mais ne le côtoie pas. Bref, le passé et le présent se mélangent dans la narration pour donner un autre point de vue au procès et aux excès toujours pardonnés à James le bien né.
Plot twist de fin de procès
À partir de maintenant, je vais devoir spoiler donc si vous voulez lire le livre ou voir la série, clic sur la croix rouge ! Vers la fin du livre, on découvre donc que la fameuse Holly a été violée par James et, plot twist ! Holly a changé de nom. Elle se fait désormais appeler Kate et, oui, c’est l’avocate générale. Donc elle sait qu’Olivia à bien été violée puisque James a dit la même phrase, agi de la même façon. Mais dans le livre, seule la besta de Kate, sa meilleure amie rencontrée à Oxford, a les pièces du puzzle pour comprendre qui avait violé Holly à l’université. Cette dernière n’ayant jamais révélé le nom du coupable. Et surtout pourquoi c’est tendax que Kate gère ce procès. C’est d’ailleurs la besta qui ira voir Sophie après le procès pour lui balancer qu’Olivia n’était pas la première.
La série empile les ingrédients n’importe comment
Dans la série, on torpille un peu tout ça. Sophie et Holly sont plus ou moins dans le même gang de potes. Sophie découvre que Holly a été violée dès l’université. Pire, une assistante sociale vient parler aux journaux pour dire qu’une certaine Holly Berry avait prétendu avoir été violée par James. Du coup, Sophie se remet en tête la fameuse Holly et finit par la reconnaître. Elle va donc aller là confronter, tranquille. La révélation tombe donc bien plus tôt et surtout, on comprend qu’Holly va bien se faire violer par James avant de voir la scène. Dans le roman, on sentait que ça n’allait pas bien se finir pour Holly tant elle semblait peu adaptée à Oxford et la cliques des fils et filles de. Mais la scène du viol est une vraie surprise. . Le roman prend une autre dimension mais surtout, dans le roman, James n’a pas conscience d’avoir violé qui que ce soit.
Un propos quelque peu travesti
Parce qu’en plus de mal jouer ses cartes, la série travestit pas mal le propos à mon sens. Outre le scandale avec la plainte pour viol, le roman raconte surtout l’impunité des bien nés. Car si James a ses histoires de moeurs, son meilleur pote aka le Premier Ministre a quelques casseroles peu reluisantes du temps des Libertins. Genre un mec mort d’avoir sauté d’un toit après avoir consommé de la came apportée par le Premier Ministre alors étudiant dans une soirée. James pense sincèrement qu’Holly est conquise, tout comme Olivia était acquise et qu’il n’a rien fait de mal. Or dans la série, après avoir violé Holly, il se rend chez Sophie et lui demande de prétendre qu’il a passé la soirée avec elle. Dans le livre, c’est clairement pour avoir un alibi pour la mort du gars du toit. Mais dans la série, Sophie se demande s’il ne voulait pas couvrir aussi le viol. Alors que dans le livre, il n’y a aucune ambiguité à ce niveau-là. Comme il pense ne pas avoir violé Olivia.
Torpiller le suspense
En dévoilant le pot aux roses trop tôt, la série se torpille d’elle-même. J’ai pas mal apprécié le roman alors que j’ai trouvé la série un peu molle et chiante. Même si, dans le roman, on laissait beaucoup de place à Holly sans que je comprenne bien pourquoi avant le reveal. Alors que dans la série, elle est vraiment un personnage secondaire. Dans le roman, j’ai le temps de m’attacher à elle et de comprendre ses sentiments vis-à-vis de James. De comprendre l’enjeu de la scène de viol, la dévastation. Dans la série, non. Tout est tourné sur Sophie. Peut-être parce que c’est Sienna Miller et qu’il faut la mettre en avant mais est-ce un bon argument pour modifier une trame narrative ? Je ne crois pas non.
Lisez le livre, boudez la série
Bref, si l’histoire vous intéresse et que vous n’avez pas encore lu ou regardé, ai-je vraiment besoin de repréciser le format que je vous recommande ? Bon, après, si vous avez lu jusque là, je vous ai tout spoilé et je ne suis pas certaine que le livre reste intéressant si on connaît tous les rebondissements. Par contre, la série Netflix, même si c’est une mini-série, vraiment, c’est l’ennui. Y aura toujours mieux à regarder.
