Bonjour, je ne suis pas cinéphile même si… Bah depuis que je vis à Bordeaux, je vais voir pas mal de films. Et même pas tous ceux que je voulais voir. Genre j’ai raté About Kim Sohee, je ne pense pas que j’aurai le temps d’aller voir Le règne animal, Perfect days, Past lives… Oui, ok, beaucoup de cinéma asiatique mais j’adore leur narration. Cependant, si je regarde la liste des films que j’ai vu cette année, au cinéma ou ailleurs, une autre nationalité émerge : la France. Et oui, le cinéma français m’a offert quelques pépites et aujourd’hui, modestement, j’ai envie de lui redonner un peu de lettres de noblesse.
Le cinéma français, c’est pas juste Christian Clavier
Pour les plus cinéphiles d’entre vous, cet article va sans doute raisonner comme un enfonçage de portes ouvertes mais j’avais quand même à coeur de l’écrire. Parce que je suis un peu lasse du bashing gratuit concernant une catégorie du cinéma français. Alors on va s’entendre : je n’aime pas les comédies grossières et manichéennes à la Christian Clavier. Désormais prisonnier de sa propre caricature, l’acteur qui a basé son humour sur les archétypes nous sort systématiquement son personnage de bourgeois réac obtus et qui crie. Et pour comprendre c’est quoi l’humour sur les archétypes, je vous renvoie à l’excellente vidéo de Rigolo sur les Visiteurs. Je vais pas prétendre que cette f(r)ange là du cinéma français est supportable et ça me rend folle de voir que ça fait des entrées. On a eu trois “Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu”. C’est quoi votre problème, les gens ? Je crois qu’à choisir, j’aurais plus de facilité à excuser les fans de la bande à Fifi même si… je n’ai vu aucun de ses films donc mon avis n’est pas éclairé.
Le drame social du Bourgeois qui aide le gosse de banlieue
Il y a aussi toute une partie du cinéma “drame social” qui m’épuise rien que par sa bande-annonce. Le classico “un Bourgeois ou une Bourgeoise qui possède un talent dont il a fait son métier va aider un gamin de banlieue”. Là, on est pas mal dans le pathos qui voudrait bien faire mais fait plus de mal qu’autre chose. “Les gamins de banlieue, ils ont de la valeur aussi”. Bien. “Les gamins de banlieue, ils ont besoin d’un Bourgeois ou une Bourgeoise pour les tirer de la merde et leur crier dessus parce que sinon, ils font des conneries”. Pas bien. Perso, j’aurais plus tendance à dire que les gamins de banlieue ont surtout besoin d’un vrai système éducatif et d’infrastructures qui leur garantit un minimum d’égalité des chances mais ce doit être mon côté gauchiste. Et aussi que les gamins de banlieue devraient tous avoir le droit de s’en sortir, même ceux qui n’ont pas de talent particulier.
Quand ton personnage perd toute crédibilité
Le cinéma “drame social” a souvent un tic assez insupportable : les tirades. Je déteste les tirades au cinéma car je ne peux m’empêcher de trouver que ça sonne faux. Personne ne parle comme ça. Certes, le langage fictionnel se dépouille de nombreuses interjections, il va droit au but. Une très bonne vidéo du tropeur sur le sujet. Evidement que je n’ai pas envie de voir un personnage mal parler au sens grammatical du terme. Mais ces grandes tirades, qu’on va souvent retrouver dans la bande-annonce, me donne la furieuse impression que le personnage cède la placer à l’auteurice de l’histoire et je perds ma suspension consentie de l’incrédulité. Je ne crois plus à ce personnage car je ne le vois plus que comme une marionnette manipulée par des auteurices en quête de la phrase qui restera dans les annales.
Un cinéma de genre vivant
Mais cantonner les films français à de mauvaises comédies ou de mauvais drames sociaux pensés par des gens qui veulent s’acheter une bonne conscience à moindre frais, c’est faire fi de tous les autres. A commencer par le cinéma de genre. Comme j’aime les dystopies, j’en ai vu quelques unes, made in France. On a tout le cinéma de Jeunet, du Enki Bilal. Des choses réussies comme Mars Express ou assez ratées comme Le dernier voyage ou Arès. Mais si je n’ai pas tout apprécié, je n’ai pas l’impression qu’il y ait malice, mauvaises intentions derrière ces films. Et je trouve rafraîchissant de voir, parfois, autre chose au cinéma. Parfois même des films issus d’histoires commencées sur Youtube comme Le visiteur du Futur. Même si les films de Youtubeurs, c’est paaaas… Je ne dirai pas que j’ai détesté Le manoir par exemple mais pour une ou deux vannes drôles, reste 1h30 de pur malaise.
De l’humour sans oppression, aussi
Et puis il y a des comédies qui n’emploient pas Christian Clavier, Frank Dubosc, Fifi ou je ne sais qui. Des films drôles qui ne vont pas taper dans l’oppression facile. Avec mon mec, nous avons récemment regardé Bonne conduite avec Laure Calamy. J’ai l’impression que Laure Calamy, c’est un peu comme Virginie Effira : tout le monde l’aime bien. Ce qui n’est pas forcément la garantie de bons films. J’ai pas aimé L’origine du mal avec Calamy. Et j’ai été déçue par Adieu les cons avec Effira. Film français écrit et réalisé par Albert Dupontel. Donc Bonne conduite avec Laure Calamy. Ca raconte l’histoire d’une psy qui anime des stages de récupération de points et décide de tuer les pires chauffards, l’amour de sa vie étant mort lors d’un accident de la route causé précisément par un chauffard. C’est drôle, assez incisif. Ca se regarde littéralement tout seul. Alors est-ce que le film a bidé parce que ça tape quand même pas mal sur les mâles (blancs) Fangio du dimanche ou juste parce que ce film est sorti en toute discrétion ?
Une comédie sympa
Les critiques ne sont pas folles mais y en a un qui a mis un 2 en mode “je me suis pas du tout renseigné sur ce film, je pensais qu’il serait comme ci et comme ça et pas du tout”. Alors ça m’arrive tout le temps, ça. Mais si j’ai été déçue d’un film parce que mon imagination a brodé autre chose, je vais pas le reprocher au film, en fait… Bonne conduite n’est sans doute pas la comédie de l’année mais c’est un film sympa. Le réalisateur, Jonathan Barré, est surtout connu pour son travail pour et avec le Palmashow. On retrouve d’ailleurs le duo David Marsais et Gregoire Ludig dans ce film. A noter que le personnage de Ludig est à mon avis le point faible de ce film, toujours coincé dans son éternel rôle de beauf. Dans Les vedettes, ça avait du sens mais là… J’ai pas compris le projet. Les vedettes, d’ailleurs, petite comédie touchante qui n’a clairement pas eu le succès qu’elle méritait. Même si le film m’a rappelé à quel point j’exècre la télé et le snobisme parisien. Les vedettes est intelligent car il renverse les présupposés. Tu crois qu’il va te raconter une histoire de gros beaufs qui rêvent de passer à la télé mais c’est finalement une critique subtile de la télé qui exploite ces gens-là pour se faire leur beurre. On peut ne pas aimer ces histoires mais ça prouve déjà qu’on peut faire des films sans humour oppressifs et vannes sexistes, racistes ou homophobes.
Un cinéma français hors des clichés
Et à propos du Palmashow, parlons un peu de Quentin Dupieux. Oui, ils ont joué dans Mandibule et Au poste ! alors ça passe. Et ils font des caméos dans Fumer fait tousser qui est un film vraiment pas mal. Y a des trucs un peu dégueus mais je l’ai bien aimé. Tout comme Yannick, d’ailleurs. J’ai conscience que Dupieux, ça peut ne pas plaire à tout le monde. J’ai pas adoré Mandibule, par exemple, même si y avait de bonnes idées, quand même. Mais voilà un exemple de cinéma français qui nous sort des clichés habituels. Cette année, au ciné, outre Yannick, j’ai vu Anatomie d’une chute que j’ai adoré ou Mon crime de Ozon qui m’a bien fait rire. Mon crime qui est à l’opposé de ce que j’ai aimé dans Anatomie d’une chute, à savoir cette capacité à sonner juste. Mon crime, c’est un film pièce de théâtre où ça cabotine à mort. Si vous ne savez pas la signification du mot cabotiner, regardez ce film. Mais c’est assumé et drôle.
De la variété et de la richesse
En fait, sur la dizaine de films que j’ai vu au ciné cette année, quatre sont français. Et j’ai aimé les quatre. Pour différentes raisons, comme évoqué plus haut. Et vraiment, ça me crispe cette volonté de basher le cinéma français en étant bloqué sur Clavier ou Godard. Alors qu’il est mort, déjà, et quoi qu’on pense de Godard, son cinéma est bien plus pensé que les drames tire-larmes grossiers qu’on nous propose régulièrement. On a des gens qui essaient de proposer autre chose. Il y a une variété et une richesse qui mérite que l’on s’y arrête. Il y a forcément dans tout ça quelque chose qui va vous plaire. Et une fois de plus, aller au cinéma voir tel ou tel film, c’est un engagement. Le cinéma est une industrie. Révélation. Elle est quand même là pour faire du fric. Donc si vous avez 10 € à mettre pour aller voir un film, choisissez judicieusement.
Choisissez judicieusement
Parce que moi, j’ai plutôt envie de voir des Dupieux, des animations de qualité, des Calamy et des Effira, plutôt que des Clavier ou Bourdon. Par exemple. Et souvenez-vous aussi que le succès de certains films faisant office de sondage d’opinion, ne donnez pas trop de force aux trucs sexistes, racistes, etc. Merci !
