Suite de ma mini série “ce livre horrible qui m’a traumatisée”[débutée y a une putain d’éternité, avant le Japon, même, je crois]. Mais comme dans tout, on peut parfois tirer du positif du négatif genre “ça, je ne le ferai jamais”. Après le “arrête de t’auto spoiler”, voici “tu ne crois pas que tu as du mal à trouver le bon ton, là ?”
C’est un drame ou une comédie, ton truc ?
En fait, je crois que c’est de ça en particulier que m’est venue l’aversion particulière pour ce roman. Ca et le fait que l’héroïne est complètement débile. Parce que j’ai pas su le situer exactement, je n’ai pas saisi les intentions de l’auteur… Parce que trop de variation de ton. Pourtant le premier chapitre qui posait la toile m’avait assez emballée. Ca manquait totalement de nuances certes. Mais le côté “le Bloc national a gagné les élections présidentielles, douche froide, les opposants sont brimés »… Ca met direct de la tension, de l’enjeu. On sent des personnages ordinaires mis au pied du mur par l’Histoire… Pile mon thème de prédilection dis donc. Je lis donc ce premier chapitre, je laisse le roman pour la nuit. Le lendemain soir, je m’y replonge avec une certaine excitation… et énorme fail. Un peu comme si j’avais prévu une nuit torride avec Jo Manganiello et qu’une fois le slip enlevé, j’avais droit à un vermicelle mi-mou. Et pas de négociation sur les réjouissances : c’est pénétration ou rien.
Peut-on être sérieux avec un trou dans le pyjama ?
Pour vous situer, tu passes d’un premier chapitre assez factuel, un peu dramatique à “hihi, je suis teubê et mon ex, c’est trop un relou”. Non mais vraiment, la meuf se fait embarquer dans un (certes faux) camp de concentration dans une France en pleine crise. Tu es sous tension par rapport au 1er chapitre et on se retrouve avec une héroïne direct décrite avec un pyjama déchiré qui fait un caca mou car elle retrouve son ex. Ex sur lequel elle avait écrit un livre pour se venger. Mais quelle claque, putain.
La narratrice est une ado attardée
Parce que comment tu veux rentrer dans un roman qui est censé te raconter une histoire dramatique mais qui est raconté par une nana qui a 13 ans dans sa tête… avec un style d’une enfant de 13 ans. Et encore, des enfants de 13 ans s’en sortent bien mieux. On est à la limite de démarrer chaque chapitre par un “cher journal”. Alors on avait déjà le problème de l’auto-spoiler qui te flinguait bien le suspense mais là, encore, comment tu veux créer un enjeu quand les événements sont décrits par une héroïne tellement débile qu’elle est plus inquiète pour le trou dans son pyjama que par sa propre déportation ? Non mais vraiment, pendant tout le passage dans le camp de concentration, passage qui débute par une (fausse) exécution quand même, l’héroïne te raconte ça sous le prisme du “ahlala non mais je dois partager ma chambre avec mon ex, trop dure la vie, pfff”. Ah ben écoute, si c’est ton seul problème alors que ta vie est potentiellement menacée, tant mieux pour toi. Par contre, tu m’excuseras mais niveau tension, c’est loupé…
Le choix du ton est crucial
Parce que oui, au-delà de l’histoire de fond, la forme ça compte aussi. On le dit souvent mais les mots ont un sens et la tonalité peut complètement changer le sens de l’histoire. Un exemple, vous allez le voir : “Dès la nuit de leur arrivée au pouvoir, le Bloc identitaire a décidé de déporter ses ennemis politiques. J’en faisais partie” et “Alors que j’étais en train de finir mon nouveau roman, des policiers sont arrivés et m’ont embarquée, je comprenais rien. Mais le pire était à venir : j’avais un trou dans mon pyjama et j’allais en plus retrouver mon pire ennemi. Mon ex.” Je ne dis pas qu’il faut être forcément hyper dramatique en toutes circonstances, cf La vie est belle mais là, comment tu veux accepter qu’un personnage est en danger quand son principal problème est un trou dans son pyjama ?
L’héroïne, d’ailleurs… va falloir qu’on en parle.
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