Raconte moi des histoires

Pour bien raconter les histoires, il faut aussi savoir les écouter

Une petite bande-annonce ?

Avant, quand j’allais (peu) au cinéma, j’avais un impératif. Ne pas arriver trop tard pour voir les bandes-annonces. Bah oui, peut-être qu’il allait y avoir un film qui allait me tenter, que j’aurais envie de voir. Avec la grosse voix de Richard Darbois pour mettre un peu d’enjeu ou de mettre l’esprit de Noël de Disney avec cette même voix un peu primesautière qui te dit qu’à Noël, y aura Aladdin, youpi. Sauf qu’en fait… bah les bandes-annonces, c’est de la merde, finalement. D’abord parce que ça te raconte une histoire qui n’est pas toujours celle du film mais surtout ça te spoile de fou. Donc aujourd’hui, on parle bande-annonce car c’est aussi du narratif.

Une bande-annonce au cinéma

Un suspense vite éventé

Savoir donner envie est tout un art. Comment initier une narration en donnant suffisamment pour convaincre l’audience de venir découvrir la suite sans trop en dire. C’est l’exercice compliqué d’un quatrième de couverture… que je lis assez rarement concernant des livres dont j’ai entendu parler ou qu’on me conseille. Parce qu’il arrive que le quatrième de couverture te résume carrément la moitié du livre. Genre “Jules-Etienne est un étudiant sans histoires qui découvre un jour un mystérieux manuscrit. Avec ses amis, il va le déchiffrer et partir à la recherche d’un trésor légendaire qui le mènera jusqu’à la mystérieuse Atlantide”. Sauf que l’histoire de l’Atlandide, ça émerge à la page 300 sur 500 donc bof… Evidemment, ce roman n’existe pas. Par contre un roman qui existe, c’est Solaris. Et si vous regardez les résumé de Solaris, neuf fois sur dix, on te balance le premier twist. Alors que le roman essaie de te planter une ambiance, on suit Kelvin qui comprend qu’il se passe des choses étranges mais on ne te dit pas quoi pour que tu stresses un peu avec lui. Mais le résumé, ça, il s’en fout, il te dit direct ce qu’il se trame. 

Solaris

Le plan iconique de fin de fil direct dans la bande-annonce

Les bandes-annonces, c’est même parfois pire. J’ai un souvenir précis de mon adolescence. Le film Le Saint avec Val Kilmer. J’ai assez peu de souvenirs du film en lui-même, je crois que ce n’était pas terrible. Bref à un moment du film, on nous fait croire qu’il est mort ou disparu. Mais je savais que ce n’était pas le cas. Je ne dis pas que je m’en doutais, non, je savais. Je savais car dans la bande-annonce, il y avait un plan assez iconique que je n’avais pas encore vu dans le film. Ah oui, effectivement, il était quasi à la toute fin. Pour le suspense, on repassera. Je pense qu’il existe des trouzaines d’exemples du genre.

Val Kilmer dans le Saint
Val Kilmer (au centre)

Bande-annonce et film, une relation trouble

C’est compliqué la relation entre bandes-annonces et film. Normalement, les deux narrations sont “indépendantes”, on va dire mais… Déjà, c’est agaçant de construire une histoire en ménageant du suspense et de voir quelqu’un qui arrive et qui crie “mais attention, il va se passer un truc, regardez !”. C’est difficile d’instaurer une ambiance alors si tu empêches le spectateur de s’impliquer à 100% parce qu’il sait ce qu’il va se passer, c’est bof. Cependant, il existe aussi des plans impressionnants qui servent parfois plus à la bande-annonce qu’au film. Genre les money shots. Comme la Maison Blanche qui explose parce que les extraterrestres sont belliqueux. Tiens bon exemple de suspense frelaté : Independence Day. Pendant la première demi-heure, à vue de nez, on ne connaît pas les intentions des extraterrestres. Enfin “on”, les personnages du film car nous, on sait. On l’a déjà vu trente fois le plan de la Maison Blanche qui explose. J’avais même lu des articles sur comment qu’ils avaient fait avec une maquette et tout. Et là, je me demande ce que ça ferait de regarder Independence Day sans rien savoir. Avoir le doute sur la bonne volonté des extraterrestre même si les ET qui bouchent le ciel sont rarement animés de bonnes intentions. Et le plan de la maison blanche, si tu le découvres pendant le film, ça doit souffler ! 

Le money shot pour la bande-annonce dans Independence Day

Mais de quel film on parle ?

Et puis t’as les bandes-annonces qui te racontent carrément un autre film. C’était un exercice de style assez prisé à une époque : prendre un film pour en faire une bande-annonce totalement à côté. Y avait eu “Mary Poppins est un film d’horreur” et “Amélie Poulain en film psychologique car elle est une putain de psychopathe”. Même si, à la réflexion, je pense effectivement qu’Amélie Poulain a quelques petits soucis de cet ordre-là. Tiens, ça me donne envie de faire ça, jouer à créer une fausse bande-annonce. Comme si j’avais le temps, ahah. Mais au-delà de ce petit exercice de style, il arrive que des bandes-annonces te vendent un film… qui n’existe pas. Ou avec une scène coupée comme ce récent drama pour les fans de Ana de Armas. Surtout que la bande-annonce sélectionne les meilleurs moments, les meilleures répliques. C’est le réflexe habituel qu’on a face à la bande-annonce d’un film comique “comme d’hab, les trois seules bonnes vannes du film sont dans la bande-annonce”. 

Les bronzés 3, la bande-annonce de l'enfer

Le monteur a-t-il vu le film ?

Prenons par exemple Vesper Chronicles. J’ai vraiment aimé le film. Mais la bande-annonce m’a menti. Je l’avais souligné dans mon article à l’époque parce que ça m’avait agacée. Pour souligner que ça se passe dans le futur, la bande-annonce m’avait balancé… le dernier plan du film. Dernier plan du film qui a une valeur particulière dans le récit. Alors que dans la bande-annonce, tu avais l’impression qu’il allait se passer une grande partie de l’action dans ce lieu que Vesper voit à la toute fin du film. Ca ne m’a pas empêché d’aimer le film mais j’avais une autre attente en arrivant dans la salle. La bande-annonce me parlait d’un film qui n’existait pas. A se demander, même, si le monteur de la BA avait vu le film… 

Vesper Chronicles

Toujours la même bande-annonce

A une époque, j’avais lancé un blog où je m’amusais à raconter un film d’après sa bande-annonce selon ce que j’en percevais. Bon, j’ai dû écrire un article, hein. Mais je pourrais relancer le concept, tiens… On verra, je suis un peu occupée par ma recherche d’emploi actuellement. Et puis à propos de bande-annonce détournée, souvenons-nous de Tutotal. J’en regarde encore, parfois, ça me détend. Avant, j’aimais arriver tôt au cinéma pour découvrir les bandes-annonces. Mais je crois que c’est moins vrai aujourd’hui. Parce que j’ai peur que la bande-annonce me spoile, déjà. Ensuite, quand on va au cinéma régulièrement comme moi, genre une quinzaine de fois en 2022, folie, on revoit toujours les mêmes. Franchement, arrêtez de pleurer parce que personne ne va au ciné. Tu choisis six films dont tu vas diffuser la bande-annonce en boucle, six qui sont “bankables” et qui ignorent totalement les films de genre. Je n’ai pas vu une seule bande-annonce pour Le visiteur du Futur, Inu-Oh, Junk Head, Les bonnes étoiles. Les bonnes étoiles, le truc a été primé à Cannes. Même Nope, je n’ai pas vu de bande-annonce au cinéma. After Yang, je l’ai vue sur Youtube. Pour le coup, bien joué, ce fut mon coup de coeur 2022. L’origine du Mal, aussi. Par contre, la bande-annonce de L’école est à nous, je l’ai eue quasi à chaque fois. Résultat : non seulement j’ai pas eu envie de voir le film mais je pestais dès que la bande-annonce commençait. 

Extrait de la bande-annonce de L'école est  à nous

Allez, retournons au cinéma

Bref, les bandes-annonces, avant, j’aimais ça. Bon, là, je suis pas allée au cinéma depuis fin décembre parce qu’il fait trop froid pour se motiver. Mais j’ai repéré Les banshees d’Inisherin, la famille Asada, Retour à Séoul. Ah et il faut que j’aille voir les Tirailleurs pour faire chier les fachos, même si je n’aime vraiment pas les films de guerre. 

Nina

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