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Pour bien raconter les histoires, il faut aussi savoir les écouter

Le premier chapitre où tu ne comprends rien

Un premier chapitre est un exercice délicat. J’en avais parlé pour mes débuts de relecture d’Augura…  Roman que je vais réécrire car j’ai trouvé de meilleures articulations. Enfin, je devrais faire ça en 2025, je pense. Il y a des premiers chapitres qui t’intriguent, te donnent envie d’aller plus loin. Typiquement Blackwater qui pose directement le suspense quant à la réelle identité d’Elinor. Et d’autres où je…  Quoi ? Mais que se passe-t-il ? Comment je dois imaginer ça ? Au secours, je ne comprends rien. Ce genre de premier chapitre qui te fait craindre de ne pas aller bien plus loin. Comme par exemple celui de Nexus

Un premier chapitre où tu ne comprends rien

Y a un mec qui fait des trucs, je comprends pas

J’ai chroniqué Nexus sur Dystopie mais pour ceux qui n’ont pas envie de lire cet article là, je résume : c’est un polar d’anticipation à base de technologie avancée. Et notamment de drogue neuronale qui permet au personnage principal d’avoir une sorte d’interface dans la tête. Il peut se connecter à ses amis, télécharger des sortes de add-on selon les situations. Et voilà la situation du premier chapitre. D’un côté, on a Sam, agente sous couverture d’une entité quelconque. Sam est bardée de gadgets électroniques genre des lentilles de contact qui lui envoient plein d’infos en mode Minority report. Je te dis pas comme tu dois loucher avec ça. Puis Kade, le héros, est dans une chambre avec une fille qui en veut à son pénis. Il est en même temps en connexion avec son meilleur pote qui lui pousse un add-on séduction puis un truc genre hard fucker. Ce qui fait passer un très mauvais moment à sa compagne. Ah, super, une technologie qui te transforme en violeur, ça fait rêver. Bon, évidemment, dans le roman, la notion de viol n’est jamais signalée. Il lui défonce la bouche, elle va le traiter de détraqué mais ça en reste là. 

Lentille du futur

Mais de qui me parle-t-on ?

Alors OK mais à aucun moment, on ne m’a vraiment expliqué cette histoire d’interface neuronale je ne sais pas quoi. Du coup, alors que j’essayais de jouer cette histoire dans ma tête, je ne savais pas si le héros avait lui aussi des lentilles et des écouteurs ou comment ça se passait. Et je n’ étais pas certaine que la fille avec qui il était n’était pas la Sam du début à qui j’avais déjà prêté un visage. Oui, elles n’ont pas le même prénom mais je sais que Sam est sous couverture donc bon…  Bref, on ne comprend rien. Les choses vont un peu s’éclaircir par la suite mais clairement, la première bouchée de ton plat, je l’ai pas trouvée ouf. Mon cerveau doit faire une gym permanente pour recaler la scène que je me joue en fonction des données que l’on me distribue avec parcimonie.

Table de mixage

Voici ce que tu vas manger

Un premier chapitre, c’est le plus difficile à écrire, je trouve. Toi, tu as ton univers dans la tête et il faut que tu l’offres au monde. Que tu donnes à ton audience les ingrédients essentiels pour lui permettre de comprendre dans quel univers il se trouve. Mais faut pas que ça vire recette de cuisine non plus, attention ! Parce que l’audience ne sera pas perdue mais elle va être ennuyée de fou. Ah oui, d’accord, tu m’as fait un cours d’histoire sur ton univers mais du coup, je me suis endormie… Oups.

Dormir sur un livre

Petites touches par petites touches

Personnellement, j’aime bien avancer par petites touches. La soutien facile, c’est le lapin blanc, soit le personnage qui découvre l’univers plus ou moins en même temps que nous. Genre Néo dans Matrix, le héros d’Avatar dont j’ai oublié le nom. Mais parfois, y a pas d’organisation ou de réalité alternative à découvrir. Par exemple, moi, mon petit péché mignon, ce sont les dystopies. Donc là, je mets en scène des personnages qui vivent dans une société qu’ils connaissent mais pas vous. Une société qui n’est pas censée les étonner. Récemment, j’ai lu Nous, l’une des premières dystopie et ça manque pas : ça se passe dans un futur fort lointain mais de temps en temps, le héros narrateur nous gratifie “ahlala, nous sommes si évolués par rapport au XXe siècle, huhu”. Ca sonne comme si j’écrivais une dystopie qui se passe en 2050 et que mon protagoniste se gaussait régulièrement “ahlala, les Humains du XIIe siècle, ils n’avaient pas autant de technologie”. Pourquoi le XIIe ? Parce que pourquoi un Humain d’un futur lointain bloque sur le XXe siècle ? Pareil. 

Le XIIe siècle

Trouver le juste équilibre

C’est super difficile d’expliquer un univers dont le lecteur ne sait rien sans que ce soit trop froid et descriptif ou trop incompréhensible. Le souci de Nexus, c’est que son sujet est compliqué en soi. Je pense que ce n’est pas très bien écrit. Peut-être que j’aurais été plus attentive si on ne m’avait pas parlé de Sam d’entrée de jeu et qu’on avait passé un peu plus de temps à expliquer ce que Kade veut expérimenter dans une soirée. Moi, je la joue pas mal comme dans un film où le début du film est centré physiquement sur le personnage puis celui-ci monte sur un escalier ou va sur un balcon et poooooooooom, panoramique, tu découvres la ville du futur.  C’est quasi littéralement ça dans Les enfants d’Ella où la description de Néo New York est donné à travers un regard par la fenêtre de l’héroïne. Et non, la ville ne s’appelle pas Néo New York et c’est un peu dommage parce que c’est rigolo. Dans ma BD imaginaire, j’hésite à faire démarrer l’histoire par une émission de télé diffusée dans la ville. Ca donne les infos et vu que c’est inspiré de Starmania, ça collerait bien. Il se passe quelque chose à Néo Rome. Oui, là, c’est le vrai nom. Dans Ellis, je fais débuter l’histoire directement par une scène qui contient l’élément modificateur. Ellis se promène dans la forêt quand soudain… 

Une fille dans la forêt

La reine des premiers chapitres

Bref, le fait de me sentir désagréablement perdue sur un premier chapitre me rappelle l’importance d’expliciter au mieux son univers. Pour que les enjeux soient clairs, pour que l’empathie se mette en place. Surtout que moi, j’en ai beaucoup de premiers chapitres dans mes tiroirs. Les derniers chapitres, par contre…

Nina

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