Raconte moi des histoires

Pour bien raconter les histoires, il faut aussi savoir les écouter

Que la montagne est belle…

Et unanimement flippante. Je parle souvent de clichés narratif dans les rebondissements ou des personnages archétypaux. Mais les décors ne sont pas exempts de quelques clichés, eux aussi. Récemment, j’ai regardé Curon sur Netflix, série qui vaut surtout pour ses décors. Car oui, ça se passe dans la montagne et d’emblée, ça me séduit. Sauf que ça ne suffit pas toujours.

Curon et son clocher immergé

Une atmosphère oppressante

La montagne offre au écrivains plusieurs ingrédients dont on serait tentés d’user, voire d’abuser . Le froid, le sentiment écrasant de la pierre et la possibilité d’un huis-clos dès qu’il neige ou qu’un pont s’effondre. Tu rajoutes à ça les vieilles légendes des vieux du coin, quelques animaux sauvages et t’as une atmosphère oppressante sans rien faire. Tu peux également jouer avec le lac de barrage qui traîne toujours dans le coin. Comme dans Curon sus-nommé ou Les revenants. Pour le coup, le village englouti de Curon existe réellement… A se demander s’il n’a pas servi d’inspiration initiale aux Revenants, deux séries que j’ai du mal à dissocier…La montagne, ce sont des villages qui vivent dans l’ombre des pics rocheux, là où se tapissent tous les secrets.

La Montagne, un lieu d'intrigue fort prisé

C’est beau mais ça fait pas tout

La montagne a cet avantage incroyable de fournir un décor simple mais efficace. Il nous rappelle quelques peurs primaires comme la peur de se perdre en forêt, la peur des bêtes sauvages avec toujours l’une d’entre elles qui se met à crier, la peur du vide, la solitude… J’avais regardé le Chalet, également, une série française pas terrible en soi mais les décors étaient jolis. Faut que j’arrête de parler de séries en mode « c’est beau mais c’est pas terrible sinon ». Mais les séries et films ne sont pas les seuls à exploiter la montagne puisque Minier a su intégrer les Pyrénées dans ses roman, notamment Glacé. Ou Fred Vargas dans l’excellent L’homme à l’envers. Faudra un jour que je vous parle de Fred Vargas, d’ailleurs.

Fred Vargas

Une communauté soudée et un vieil ermite

La montagne offre également un petit supplément d’âme. Les montagnards, ce sont des gens à part. Des villages où tout le monde se connaît, se côtoie. Une forte communauté que l’on ne retrouve pas forcément ailleurs. Notamment par le biais de l’isolement. Les stations balnéaires, elles, doublent à minima leur nombre d’habitants chaque été, y compris les villages de pêcheurs comme St Tropez ou Collioure. Si les touristes ne perturbent pas forcément les liens intracommunautaires, il y a moins ce côté « faire partie ou non du gang ». Dans Curon, par exemple, la famille des héros a été mise au ban de la communauté à cause de la décision du barrage. Par ailleurs, il y a souvent un ermite qui traîne, dans sa bergerie haut perchée et qui connaît les vieux secrets. C’est assez drôle quand on y pense cet archétype de la mémoire collective conservée. Le mec est souvent présenté comme un marginal à qui personne ne parle et ne fait confiance mais le mec sait tout. C’est un stalker, en fait… Et souvent, il a une voix grave et rocailleuse. 

Le vieux berger, gardien de la mémoire de la montagne

Ecrire la montagne sans la connaître ?

Evidemment, il ne suffit pas d’avoir de bons ingrédients pour faire une bonne recette, on le sait bien. J’adore le sel mais si j’en mets trop, mon plat sera immangeable. Je peux avoir les meilleures tomates du monde, si je me contente de les mettre au four ou à la poele comme ça, ça va être un peu triste à l’arrivée. Et c’est parfois le souci que j’ai avec la montagne. Comme vous l’avez compris, j’adore ces paysages et ses ambiances… Mais ça suffit pas à faire une histoire accrocheuse, en fait. Autant j’ai pas mal aimé la saison 01 des Revenants (pas du tout la 02), Curon m’a un peu ennuyée. J’ai aimé Glacé et L’homme à l’envers mais le Chalet m’a rendue fort perplexe. Alors qu’en plus, celui-là, avec son côté « Ils étaient dix » couplé à la montagne, ça aurait dû être parfait. Mais la mayonnaise n’a pas pris alors que je trouvais le projet vraiment pas mal sur le papier. Moi-même, j’ai parfois envie d’écrire des histoires de montagne. Sauf que je la connais pas, la montagne. J’y suis pas allée depuis les Alpes japonaises, j’ai pas fait de ski depuis seize ans… Je suis définitivement une fille de la mer. Je changerai peut-être mais en attendant, je peux pas écrire sur la montagne car je ne la connais pas…

La montagne vue du ciel

Connaître la montagne pour bien l’écrire ?

Et c’est là que, je crois, se situe la différence entre ceux qui connaissent vraiment la montagne (Minier et Vargas de ce que j’en ressens) et ceux qui s’en servent car le décor est cool et que ce sera parfait pour une ambiance flippante à la limite du huit-clos. J’ai la même pour Marianne, série Netflix française, qui avait bien exploité le décor de l’école déserte sur une île, les manoirs bretons mais… Bah c’était pas si ouf. Ca m’a pas du tout empêchée de dormir même quand je le regardais tard. Finalement, c’est ça la conclusion de l’histoire. Ce n’est pas la peine d’utiliser un bon produit si tu sais pas t’en servir. Genre si tu achètes une belle truffe fraîche, n’en abuse pas dans tes plats sinon, tout aura le même goût et ça finira par être écoeurant. Je crois que je tiens ici la meilleure conclusion de tout ce blog.

Nina

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