Raconte moi des histoires

Pour bien raconter les histoires, il faut aussi savoir les écouter

Le fan service pourrit la narration

Je suis pas une grande cinéphile, on sait. Essentiellement parce que je sors trop facilement d’un film quand la narration déconne. Je veux dire 2h pour raconter une histoire, aucun grincement de dent ne peut être dilué. Alors que dans une série, ça peut être moins crispant. Sauf quand tous les personnages sont irréellement stupides. Genre la Casa De Papel, là… Et il y a un truc que je ne supporte plus, c’est le fan service. Parce que pomper une scène d’un film ultra connu en guise de clin d’œil, j’en peux plus. Si je veux voir la scène culte en question, je regarde le film original. Là, j’ai juste l’impression de regarder un film patchwork cynique et ça saoule. 

Une photocopieuse

La parodie ou l’hommage, oui

Alors évidemment, je ne parle pas ici de parodie. J’ai adoré La cité de la Peur, Y a-t-il un pilote dans l’avion ou Hot shots… même si j’ai vu tout ça depuis… Hot shots, je crois que j’avais la VHS. La VHS… En 2022, je vais moyennement m’épargner niveau autotorture on dirait. Genre « ah oui, la VHS, c’était le truc déjà obsolète quand ton alternant est né ? ». Après est-ce que c’est ma faute si on commence l’exploitation des travailleurs à peine ceux-ci sortis de l’adolescence. Par contre, c’est totalement ma faute si je digresse. Donc je ne parle pas ici de parodie où la reproduction de scènes en exagérant certains points est un exercice fort jouissif. Ni même des hommages avec une scène reproduite avec maestria parce que le réalisateur se fait plaisir. Non, je parle de copier/coller premier degré et nous allons parler spécifiquement de Jurassic World.

Hot shots

Une narration tordue pour remplir le cahier des charges du fan service

Alors pour bien mettre dans l’ambiance, je vais préciser un point. Je n’aime pas la saga Jurassic World. J’ai même pas fini le premier. Une histoire d’avion qui atterrit et je dois rendre la tablette sur lequel je regardais. Et je n’ai jamais ressenti le besoin de voir la fin vu que je la connais. Parce que j’ai vu Jurassic Park, en fait. Le souci n’est pas tant d’avoir un film qui se termine de façon convenue. Il y a des centaines de films qui se terminent sur une scène spectaculaire avant d’enchaîner sur une sorte d’apaisement, la sérénité des héros qui ont survécu à la pire menace et soufflent de soulagement en souriant. Le souci, ici, c’est qu’on tord une narration pour arriver à y glisser des clins d’oeil qui ne sont même pas satisfaisants tellement ils sont gros. 

Ok pour les clins d’oeil de fan service mais ils servent à quoi, là ?

Je vais faire un article spécifique sur ça, tiens. Les clins d’oeil. J’en avais déjà parlé sur le fusil de Tchekhov mais j’ai vu Spiderman No way Home depuis et j’ai rechargé ma besace de trucs à dire sur le sujet. Cependant, le souci que j’ai avec Jurassic World, c’est vraiment que la narration est totalement contrainte par le fan service. Comme quand on est petits et qu’on doit faire un dessin en passant par les points, là. A la fin, ça donne un dessin relativement correct mais peut-on dire que j’ai dessiné ? Non, pas vraiment. Du coup, est-ce que je peux dire que Jurassic World est un vrai film ou un remake un peu nullos du premier ? Surtout qu’à un moment, je me pose la question : ça apporte quoi ? Ca m’apporte quoi que Jeff Goldblum qui court avec des fusées de détresse soit remplacé par une meuf en talons ? Jeune femme qu’on m’a rendue assez peu sympathique au demeurant ? Ca m’apporte quoi que toutes les cinq minutes, on vienne me filer un coup de coude dans les côtes en s’écriant “hé hé, t’as vu, c’est comme Jurassic Park. Juste en moins surprenant, ahah !”. Mazette.

Claire dans Jurassic World

On aurait pu faire un bon film en se détachant du matériel de base

Franchement, je trouve que le sujet de parc à dino est potentiellement intéressant. Même dans un univers où Jurassic Park existe. ll y avait deux ou trois plans ou idées assez inspirés comme la ferme des bébés dinos où jouent les petits enfants, la question du toujours plus spectaculaire et d’un public blasé, des ados relous subissant le divorce des par… ah non, ça, on s’en fout. Il y a vraiment possibilité de réaliser un bon film sur le sujet. Ou sortir des dinos et mettre des attractions à couper le souffle. Je fréquente assez peu les parcs d’attraction mais les manèges sont de plus en plus grands, rapides, impressionnants, 4D chais pas quoi, youhou… Forcément, à un moment, ça va mal se terminer. Et je parle pas juste des trucs qui restent bloqués au sommet pour faire passer le pire réveillon du monde à huit pauvres personnes

Jurassic Park ride à Universal Studio Japan

Arrêtez de capitaliser sur ma nostalgie

C’est toujours la question du but d’un film. Sur les Jurassic World, on est clairement là pour traire une vache qui avait été bien généreuse. On se dit qu’il doit encore rester de quoi faire un ou deux camemberts. Sauf qu’en vrai, la vache, c’est nous, clairement. On va exploiter notre nostalgie jusqu’à la moelle, nous taper dans le coeur pour nous braquer le portefeuille. Et là, encore, pourquoi pas si c’est bien fait ? Mais si je prends les Jurassic World avec son cahier des charges “refais la scène de” qui me sort instantanément du film, Ready Player One qui n’était qu’un long onanisme gênant… avec toujours le T-rex, ahah. Je vous jure, je l’ai vu débarquer, j’ai lâché un gros “oh non” des familles. Ou même Spiderman No way home qui raconte même pas une vraie histoire. On dirait les épisodes spécial Noël des années 80 qui ne sont même pas canons et qui sont juste là pour faire une sorte de bouquet de caméos sans queue ni tête. Et cet événement n’existera plus dans la mémoire des personnages. 

Spiderman No way home

Un remake qui ne dit pas son nom

Bref, on râle souvent sur les remakes, sur l’absence d’histoire originale mais à la limite, je préfère un remake assumé. Et j’ai bien aimé Dune, d’ailleurs. Même si un plan par plan n’aurait aucun intérêt. Là, j’ai vraiment l’impression que ce sont des remakes même pas tout à fait assumé qui doivent un peu déstabiliser ceux qui ne pigent pas la ref. Je veux dire pourquoi y a une fille en talons qui va tirer des fusées de détresse sous le nez d’un T-rex ? Dans Jurassic Park, cette scène a du sens. Dans Jurassic World, je… non. C’est juste se mettre en danger connement. Bon, en même temps, la fille prétend semer un T-rex en talons alors que le bestiaux court à 40 km/h, c’est précisé dans le premier Jurassic Park. Déjà, en basket, personne ne court à cette vitesse (surtout pas moi) mais en talons ? Je veux dire, tu veux te suicider, y a des armes partout autour de toi, ce sera sans doute plus rapide, hein… 

Bryce Dallas Howard, Claire face à un dominus rex
Franchement, je trouve que la badassittude de Claire est mal exploitée

On aime être pris pour des cons

Bref, ça me saoule toujours un peu cette sensation qu’on ne me raconte une histoire que pour me prendre mes sous. Je sais bien que le cinéma est une industrie et pas un pote un soir de camping qui te raconte une histoire par simple plaisir. Mais quand on me fait pleurer sur la crise du cinéma à cause du téléchargement, ça coince. Non, la crise, c’est qu’on nous prend pour des cons et que ça finit par lasser. Enfin, je dis ça, quand je vois l’offre divertisso-médiatique (?) des dernières années, finalement… c’est juste moi qui dois être une vieille réac élitiste, allez savoir.

Nina

Un commentaire sur “Le fan service pourrit la narration

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