Et moi, je ne le suis plus vraiment, jeune. J’ai hésité à écrire cet article parce que j’étais là “non mais tout le monde a lu le livre ou vu le film. Personne n’a besoin de ton avis”. Et je le pense encore. Mais moi, ma passion, c’est la narration. J’ai parlé du comte de Monte-Cristo dans mon article sur la vengeance ainsi qu’un peu dans celui sur Revenge. Et dans mon dernier vu, lu, entendu, pensé. Nom de rubrique bien long pour un truc que j’anime une fois tous les six mois en moyenne. Mais ça ne me suffit pas. J’ai envie d’en faire un article à part entière parce que c’est un objet fictionnel incroyable. A noter que je vais parler du livre car j’ai pas encore vu le film avec Niney et je ne regarderai jamais la mini-série avec Depardieu.

Un homme déterminé à se venger
Le comte de Monte-Cristo, c’est une histoire de vengeance. Une vengeance totale, longue et impitoyable maîtrisée à la quasi perfection. Edmond Dantès est un jeune homme à qui la vie sourit. Grâce à une mission bien menée à bord de son vaisseau, il va être nommé capitaine. Il prévoit donc d’épouser sa fiancée, la belle Mercedes, sous le regard heureux de son père. Un tableau idyllique qui comporte quelques ombres au tableau. Des ombres qu’Edmond ne voit pas. Car son insolent succès suscite la jalousie. Son voisin, Caderousse, jalouse sa fortune, Ferdinand, un pêcheur, est fou amoureux de Mercedes. Mais c’est surtout Danglard, un de ses collègues, qui veut supprimer Dantès du tableau car il pourrait révéler quelques unes de ses malversations. Les trois hommes vont se liguer pour accuser Dantès de Bonapartisme.

Enfermé au Château d’If
Car Danglard sait que Dantès a été chargé par le capitaine mort en mer de son bateau de livrer une lettre à Paris. Une lettre qu’il est allé récupérer sur l’île d’Elbe. Effectivement, cette lettre est retrouvée et, pas de chance pour Edmond, son affaire est traitée par Villefort, substitut du procureur du Roi très ambitieux. S’il est d’abord enclin à accorder la clémence à Edmond, il découvre que la fameuse lettre incrimine son propre père. S’il est découvert que son père est une cheville ouvrière du retour de l’Empereur, c’en est fini de la carrière de Villefort. Ni un ni deux, il crame la lettre et envoie Edmond au Château d’If.

Un ex bagnard et son trésor
Il y restera enfermé 14 ans. Durant sa détention, il parviendra à entrer en contact avec son voisin de cellule, l’Abbé Faria, qui lui révèlera l’emplacement d’un fabuleux trésor. Parvenant à s’échapper, Edmond met la main sur le fameux trésor et décide d’utiliser cet argent pour mener une vengeance très compliquée.

Un pavé qu’on n’aborde pas si on n’a pas le temps de lire
Le roman fait la somme de 1889 pages aux éditions Calmann-Lévy, si j’en crois Wikipedia. Moi, je l’ai écouté en livre audio : quasi 27h d’écoute. Par un narrateur assez pénible qui n’arrêtait pas de dire “n’est-ce-est-ce-pas ?”. Pourquoi ? Moi qui n’ose pas me lancer dans la lecture audio en tant que lectrice… essentiellement parce que je sais pas bien comment faire, mais franchement d’où je complexe ? Donc c’est un morceau. Une lecture que tu n’entreprends pas si tu n’as que peu de temps de lecture et que tu souhaites varier les genres. Sauf si ça vous gêne pas de lire plusieurs livres en même temps, évidemment. On en reparlera plus tard dans l’article. Parce que la vengeance d’Edmond est longue et complexe.

Et puis soudain, un protagoniste que je ne connais pas du tout
Le roman se passe en plusieurs époques. D’abord le bonheur d’Edmond, la prison. Puis sa survie avant de mettre la main sur le trésor. Il retourne à Marseille faire une bonne action ou deux puis semble disparaître. Sans transition, voici Frantz. Frantz ? Non, moi non plus, je ne sais pas qui c’est. Frantz est un noble français en goguette en Italie et on lui propose d’aller chasser sur l’île de Monte-Cristo, riche en gibier. Attends, l’île de Monte-Cristo, oui, là où se trouvait le trésor d’Edmond ! D’ailleurs, Edmond va se retrouver dans un Palais souterrain avec un prince mystérieux qui se fait appeler Simbad le marin. Ah oui, Simbad le marin, la signature sur la lettre qui a aidé à sauver Morel, l’ancien patron d’Edmond qui avait tout fait pour le sauver. Ok. Mais du coup, si j’ai bien compris que Simbad est Edmond, c’est qui Frantz ?

Des bourgeois français en goguette et un brigand mystérieux
Ah, Frantz part à Venise pour le carnaval et retrouve son ami Albert. Qui est Albert ? Moi non plus, je sais pas. Ah, Simbad, appelé ici le Comte de Monte-Cristo est dans la place. Il est accompagné d’une mystérieuse princesse grecque. C’est qui, elle ? Y a une comtesse qui prétend que le mystérieux comte serait un genre de vampire car il est vraiment très pâle, quand même. Qui est cette comtesse ? Une socialite quelconque, que vous dire d’autre ? Là, on apprend qu’il y a un brigand en ville, Luigi Vampa. On découvre toute son histoire et dans ce récit, on apprend qu’un voyageur lui en doit une. Oh tiens, bizarre cette info, l’air de rien. Au carnaval, Albert se fait séduire par une intrigante et tombe dans le piège de Luigi qui réclame une rançon. Ohlala, heureusement, le comte de Monte-Cristo a quelques accointances avec Luigi car c’est lui le voyageur ! Le comte sauve Albert et obtient de lui de l’intégrer à la bonne société parisienne quand il arrivera à la Capitale. Aaaaah…

Chaque histoire parallèle est en fait un rouage
Ok, c’est genre un coup de billard à trois bandes. Mais attendez, ce n’est pas fini. Non, non, non. Parce qu’Albert, en fait, c’est le fils de Mercedes et Fernando. Fernando devenu comte à la suite de quelques fourberies, information que nous avions, effectivement. Et dans l’entourage de la famille de Morcef, puisque tel est leur nom, on va retrouver Danglars, Villefort et leur famille. Caderousse, non, parce que c’est un loser mais rassurez-vous, il a sa propre intrigue aussi. De là, les histoires vont se multiplier. La mystérieuse princesse grecque se nomme Haydée, c’est l’esclave du comte mais surtout fille du pacha que Morcef a trahi. On va découvrir aussi que M. Villefort et Mme Danglars ont eu un enfant ensemble. Enfant qu’ils pensaient mort-né mais en fait, non. Le récit va se densifier. Des intrigues politiques, des intrigues amoureuses, des histoires de poison. Je vais pas tout détailler mais en gros, plusieurs fois, je me suis demandé à quoi servait une intrigue et à chaque fois, je réalisais que ça devenait un rouage. Le rouage implacable d’une vengeance savamment calculée.

Edmond est fort mais pas surpuissant
Alors pourquoi je trouve que le Comte de Monte-Cristo, c’est vraiment bien ? Car par rapport à d’autres fictions de vengeance comme Revenge ou J’irai cracher sur vos tombeaux (la télénovela, pas le roman), rien n’est laissé au hasard. Mais rien n’est laissé à la magie non plus. Si j’ai un peu râlé sur Revenge où Emily était à la limite de l’omniscience et de la chatte de compétition, là, tout est minutieusement calculé. Quand Edmond arrive à Paris, il connaît les forces, les faiblesses et surtout les secrets des uns et des autres. Des secrets qu’il a parfois obtenu par la ruse en se faisant passer pour un prêtre, Edmond prenant différentes identités selon ses besoins. Certes, Edmond, très naïf en début de roman, semble devenu un pur génie en plus d’un acteur hors pair puisqu’il fait très bien les accents britanniques ou italiens, par exemple. Il parle également l’arabe.

Un héros qui commet aussi des erreurs
Mais Edmond n’est pas infaillible. A deux reprises, au moins, des personnages réalisent qu’il ment ou il est surpris dans une conversation qui n’est pas censée se passer avec témoins. Sa vengeance dérape et fait plus de victimes que prévu, il est également démasqué par deux personnages qui comprennent qu’il est la source de bien de malheurs. Edmond n’est pas parfait. Ni en tant qu’Edmond ni en tant que Comte de Monte-Cristo. Il est pourvu d’énormément de qualités mais il commet des erreurs. Il doute et est malheureux. C’est toute cette humanité qui manque, je trouve, dans les fictions de vengeance. Le héros ou l’héroïne sont surpuissants. Ils savent tout faire, ils sont au courant de tout, prévoient toutes les réactions même les plus improbables.

Une mécanique très complexe
Si le comte de Monte-Cristo fait 1889 pages, étonnamment, aucun passage n’est du remplissage. Tout s’inscrit dans le plan machiavélique d’Edmond. De façon plus ou moins longue, de près ou de loin. C’est la mise en place d’un système de rouages minutieux et complexe. A partir du moment où j’ai compris à quoi avait servi tout le passage à Venise, j’ai pris toutes les péripéties avec curiosité. Une curiosité excitante. Tiens, pourquoi Edmond va parler à telle personne ? Pourquoi il achète cette maison ? Tout se met en place, tout est logique. Rien n’est gratuit. Et c’est tellement satisfaisant quand le premier domino de la vengeance tombe et que tout s’enchaîne à la perfection.

Certes, on aurait pu couper un truc ou deux
Alors oui, 1889 pages, c’est beaucoup et sans doute aurait-il été possible de couper quelques péripéties. L’arc Caderousse, par exemple… Même s’il fallait bien qu’il paie sa cupidité mais on aurait pu s’arrêter après la mésaventure du bijoutier. La fuite d’Eugénie et Louise ne m’a pas passionnée même si : une jeune fille décrite comme belle mais d’un caractère masculin” qui est en adoration devant sa camarade, refuse de se marier et fuit avec sa besta tout en se déguisant en homme… Le roman ne le dit jamais mais c’est bon, on a capté. Mais il faut rappeler que Le comte de Monte-Cristo a été publié sous forme de feuilleton. Alors oui, il faut ménager un peu son suspense.

Le feuilleton, le format idéal des histoires longues ?
Et cette écriture feuilletonnée m’intéresse. Déjà en tant que scribouilleuse puisque mon projet Audrey atteint désormais 358 pages et j’ai encore plein de choses à raconter. Et vu que ce roman est un peu des chroniques des amours de différents personnages narrées par Audrey, le format feuilleton peut être absolument adapté. Il faut que je fasse une petite étude pour savoir quel est le format type des nouveaux épisodes/chapitres sur Wattpad. Je ne connais pas du tout les us et coutumes là-bas pour le moment. De toute façon, j’en suis toujours à la primo-écriture et je vais entrer en formation donc autant dire que si je lance le premier épisode ou chapitre d’ici un an, ce sera une immense victoire. Mais je trouve ce format génial. Surtout que ça correspond à mon format de lecture : je lis un livre papier, un livre sur ma liseuse, des BD aux toilettes, j’écoute un livre audio. Au moins quatre histoires à la fois. Et le feuilleton me paraît un format facile à suivre, finalement.

Couper en petit bout pour lire une longue histoire
Si je donne un livre de 1889 pages à quelqu’un, il y a de fortes chances qu’il ne soit pas super réjoui. A moins qu’il ait énormément de temps de lecture devant lui genre une jambe cassée ou une croisière plongée où tu ne fais que plonger et naviguer. J’ai avalé le tome 3 de Game of thrones dans ces conditions. Mais le même livre en plusieurs morceaux, oui, tout le monde l’accepte. C’est ainsi que j’ai dévoré la saga Blackwater, par exemple. Petit bout par petit bout.

L’exaltation d’attendre le prochain épisode
Le comte de Monte-Cristo a été pour moi autant une leçon de lecture que d’écriture. Sur la lecture, j’aime l’idée de lire les histoires bouts par bouts. J’adorerais que le feuilleton journalistique soit relancé, d’ailleurs. Un petit bout d’histoire par semaine. J’avais retrouvé cette petite exaltation l’an dernier avec le blog de Melaka qui racontait sa découverte de l’amour libre avec Reno. Sur Instagram, pas mal de dessinateurs distribuent leur histoire petit bout par petit bout et j’adore. Libre à moi, à nous, de lire un épisode après l’autre ou tout d’un coup. J’avais notamment été accro à l’histoire de Carreaux sur son boulot toxique, je lis assidûment l’histoire de reconversion de BD_therapie. Oui, y a comme une thématique…

Vous aussi, plongez vous dans cet univers
Quant à l’écriture, ça me décomplexe de mes pavasses. Bon, ne croyez pas que je me compare à Alexandre Dumas parce que… bah vu que ce que j’écris n’a rien à voir, déjà, ce serait vraiment bizarre. Certaines histoires ont besoin de place pour se raconter, s’épanouir. Ce n’est certes pas la norme mais quand on voit que chaque ligne du récit de Dumas sert à son intrigue, les 1900 pages ne sont pas superflues. Ce n’est pas un livre inutilement bavard. J’ai adoré et j’ai envie que ceux qui ne l’auraient pas lu se plongent dedans. Au pire, il existe dix versions de livre audio, environ. Evitez juste la version lue par Brice Laroche. N’est-ce-est-ce-pas ?