Et j’ai raté le film “Comment Jane Austen a gâché ma vie” qui aurait été parfait pour cette chronique mais ainsi va la vie. Il y a un cliché que j’ai toujours un peu de mal à comprendre. Celui des romans où des jeunes filles très romantiques sont obsédées par la littérature anglaise et plus précisément les écrits de Jane Austen. Je peux comprendre qu’on aime une autrice ou un roman. J’ai moi-même bien apprécié Orgueil et préjugés. Essentiellement parce que ça me fait toujours rire ces histoires de bourgeois qui foutent rien de leur journée et s’inventent des activités. Ca me fait rire comme dans “je suis jalouse d’eux”. Mais pourquoi les jeunes filles en fleur cliché des romans et films sont à ce point obsédées par la littérature anglaise ?

Carrie et Bridget vs les Hommes
Critique de “Je peux très bien me passer de toi” de Marie Vareille, volume 2. Dans mon précédent article, je résumais ce roman en “les aventures amoureuses de Carrie Bradshaw et Bridget Jones qui seraient copines”. En tant que personnage cliché, Chloé (Carrie) est très branchée cul alors que Constance (Bridget) est très branchée romantisme. En conséquence, une baise beaucoup et l’autre pas du tout. Enfin paraît-il. C’est ce que le roman raconte mais il me semble que si Constance ne baise pas du tout, Chloé ne baise qu’avec son ex. Donc niveau “meuf qui fait tomber tous les hommes”, ça se pose pas trop là…

L’héroïne est perdue dans sa vie
Parlons donc un peu de Constance puisque vous vous doutez bien que des deux, c’est bien elle qui est la jeune fille en fleurs. Décrite comme joyeuse, énergique, jolie et potelée. Seule dans sa vie, elle est tout le temps en bad parce qu’elle déteste son taf. Ok, Constance, je te comprends. Elle est une sorte de responsable produit dans une très grande entreprise genre Unilever ou Procter & Gamble. Elle s’occupe précisément de serviettes hygiéniques et tampons. Ok, on reparlera de ça. Bref, malgré la description très laudative qui nous est faite d’elle, j’ai du mal à la voir autrement qu’une vieille culotte grise à l’élastique très fatigué.

Un voyage sur la thématique de Jane Austen
Constance a un challenge dans le roman, elle doit coucher le premier soir. Chloé doit faire voeu d’abstinence, elle. Vu qu’elle part dans la pampa loin de son ex, ça devrait tenir. A un moment, Constance a l’opportunité de partir en Angleterre pour quelques jours et là, c’est festival. Vas-y que je réserve une chambre dans la pension Jane Austen, que je me prévois d’aller manger des scones dans un salon de thé pour faire comme les héroïnes de Jane Austen. Bref, Constance est un peu pigeonne là-dessus. D’ailleurs, la fameuse pension est toute nulle et Constance se dit qu’elle s’est bien faite avoir. Ok, se moquer des clichés, j’ai dit que c’était bien mais si c’est pour se vautrer dans les suivants, bof.

La vénération pour la littérature anglaise, un classique des comédies romantiques
Je parle de “Je peux très bien me passer de toi” mais des romans où une héroïne fleur bleue nourrit une passion insensée pour Jane Austen, c’est pas inédit. J’ai croisé ce phénomène aussi dans le troisième volet des Sept Soeurs de Lucinda Riley avec Star, la soeur passionnée de littérature anglaise. Je parle de Jane Austen mais ça marche aussi avec les soeurs Brontë. Souvenons-nous de l’atroce After où l’héroïne étudiait les Hauts de Hurlevent en classe et ne pouvait s’empêcher d’y voir un parallèle avec sa propre histoire d’amour. L’audace du truc déjà. Parce que, perso, j’ai lu After et les Hauts de Hurlevent et y en a un que j’ai vraiment aimé et l’autre que j’ai particulièrement méprisé.

Revendiquer un héritage ?
Mais je touche peut-être quelque chose du doigt ? Est-ce qu’en name droppant les noms de la littérature romantique, on revendique un héritage, une filiation ? Et pourquoi typiquement la littérature anglaise ? Je veux dire il y a de très belles histoires d’amour dans la littérature russe, très bouleversantes. Comme Anna Karénine. Fun fact : il existe une adaptation de Anna Karénine avec Keira Knightley qui joue également dans une adaptation de Orgueil et Préjugés. La littérature française aussi propose des histoires d’amour tragiques comme Le rouge et le noir, Madame Bovary, Une vie de Maupassant… Oui, bon, ok, entre Anna Karénine et ces trois exemples, on est beaucoup plus dans le tragique qu’avec Jane Austen.

Mais pourquoi pas la littérature russe ?
J’ai souvent vu associé un goût immodéré du romantisme et celui de la vie en mode britannique. Apparemment, être fleur bleue donne un amour immodéré du thé et des petits gâteaux. Alors que perso, j’adore le thé et les infusions et même les jolies tasses en porcelaine mais je suis pas fleur bleue. Ni passionnée par la littérature anglaise. Orgueil et préjugés ne fait pas partie de mes livres préférés. Même si je n’ai aucune idée de qui je mettrais dans cette liste, tiens. Guerre et paix serait devant Orgueil et Préjugés, c’est sûr. En voilà un roman fleuve avec beaucoup d’histoires d’amour, belles ou tragiques. Vraiment, pourquoi les héroïnes fleur bleue ne vont pas boire un thé noir adouci à la confiture de framboise dans lequel elles plongent un petit biscuit prélevé sur le samovar ? Oui, le coup du thé noir à la confiture de framboise, je viens de découvrir et j’ai très envie de tester.

Passion dentelle et porcelaine ?
Alors oui, la littérature anglaise pose une séduction très lente à base de regards langoureux et petits mots doux. Ca devrait me plaire, moi qui me plains tout le temps du manque de tension romantique dans les fictions. Les héroïnes n’attendent pas benoîtement l’amour. Ce sont des femmes plutôt intelligentes, résolues. Des femmes fortes. Plutôt comme Natacha Rostov, tiens. Peut-être que la différence réside dans la dentelle et la porcelaine, finalement. Les héroïnes anglaises n’ont pas besoin de se recouvrir de longs manteaux pour affronter les frimas de l’hiver. Même si j’ai un souvenir ému de la balade en traîneau de Sonia et Nicolas avec la neige qui scintille autour d’eux. Et puis niveau climat, les landes des soeurs Brontë, c’est pas fifou non plus.

Du coup, je sais toujours pas
Moralité ? Il faut que je trouve “Comment Jane Austen a gâché ma vie” en streaming, je suis sûre que ça va m’apporter le vent de fraîcheur que j’espérais trouver dans “Je peux très bien me passer de toi”. Ou du moins la réponse à la question “c’est quoi la passion des filles romantiques pour la littérature anglaise ?”